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Smartphones et tablettes, les ennemis du sommeil

Deux études révèlent un usage croissant des écrans à l’heure du coucher, et au-delà. Une veille numérique néfaste à la santé des enfants, et des adultes.

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Publié le 11 mars 2016 à 17h35, modifié le 16 mars 2016 à 08h07

Temps de Lecture 4 min.

26 % des collégiens pourvus d’un mobile le gardent allumé la nuit.

Ils se disent surpris. « Ça nous a étonnés qu’autant d’enfants de CM1 et CM2 aient un portable. Nous, on a eu notre premier téléphone en troisième… » C’est ainsi que Mary, Adélaïde, Thibault, Nassim, Thomas, et d’autres élèves de 1re en sciences et technologie du management et de la gestion du lycée Jeanne-d’Arc de Colombes (92), commentaient, jeudi 10 mars, les résultats de l’enquête « Le sommeil des jeunes, pays des écrans en veille », qu’ils ont menée, encadrés par les associations Réseau Morphée et e-Enfance, auprès de six cents élèves du CE2 à la 4e, à la fin de 2015.

C’est, pour eux, l’un des éléments les plus surprenants : 28 % des CM1-CM2 (9-10 ans) ont un téléphone portable (dont 60 %, un smartphone). En quelques années, l’âge de l’arrivée du premier portable a chuté. La part des 12-17 ans ayant un smartphone — ils n’étaient que 22 % en 2011 — a bondi de 59 % en 2014 à 87 % en 2015, selon le baromètre du numérique publié à la fin de 2015 par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc). Autre étonnement pour ces lycéens, 17 % des CM1-CM2, et même 10 % des CE2, sont inscrits sur un réseau social, Snapchat, Skype et Instagram en tête, alors que cela est théoriquement interdit avant l’âge de 13 ans, notamment en raison des risques de harcèlement.

La docteur Sylvie Royant-Parola, présidente du Réseau Morphée, établit un lien entre écrans et sommeil. Les enfants s’endorment de plus en plus tard : 30 % des élèves de 4e trouveraient le sommeil après 23 heures en semaine, selon le sondage. Ils sont de plus en plus nombreux devant un écran avant de s’endormir, pour jouer, regarder des vidéos, envoyer des messages, aller sur les réseaux sociaux… même si la lecture reste encore la plus fréquente avant d’éteindre la lumière. Et 26 % de ces collégiens gardent leur mobile allumé la nuit.

Français hyperconnectés

C’est également sur les interactions entre sommeil et nouvelles technologies qu’a porté l’enquête INSV-MGEN, menée par Opinion Way auprès de 1 013 personnes âgées de 18 à 65 ans en décembre 2015, à l’occasion de la seizième édition de la journée du Sommeil du 18 mars. Hyperconnectés, neuf Français sur dix s’adonnent aux nouvelles technologies le soir, note ainsi cette étude. Tablette, ordinateur, smartphone… 36 % les utiliseraient au lit. Et ce, à tout âge.

« Ces usages altèrent la qualité du sommeil », insiste la docteur Joëlle Adrien, présidente de l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV). Les personnes connectées le soir au lit mettent plus de temps à s’endormir, souffrent davantage de troubles du sommeil et dorment plus que la moyenne le week-end, ce qui traduit un besoin de récupération. La dette de sommeil concerne aussi 30 % des adolescents, alors que les médecins recommandent neuf heures de sommeil en moyenne.

Bien que le sommeil doive être un moment où le cerveau est en déconnexion totale, 20 % des personnes interrogées dorment avec leur téléphone en veille (donc allumé) la nuit, note l’enquête INSV-MGEN. Les alertes et autres bips en réveillent la moitié, la plupart consultent le message et, pis, 79 % y répondent. Les plus jeunes se donnent parfois rendez-vous la nuit.

Horloge biologique déréglée

Autre impact des écrans sur le sommeil, la lumière bleue des diodes électroluminescentes (LED), émise par les écrans, qui active cent fois plus les récepteurs photosensibles non visuels de la rétine (cellules ganglionnaires) que la lumière blanche d’une lampe, favorise l’éveil. « Depuis 2011, une vingtaine d’études sur l’impact négatif de la lumière bleue des écrans sur le rythme circadien et le sommeil ont été publiées », explique Claude Gronfier, chercheur en chronobiologie à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale à Bron (Rhône).

Les effets sont mesurables même avec de faibles niveaux de lumière. Une étude publiée en février dans le Journal of Clinical Investigation par des chercheurs de l’université Stanford (Californie) a montré que de brefs flashs réguliers de lumière (de deux millisecondes toutes les dix secondes) ont permis de retarder l’horloge interne de cobayes humains, même endormis. Claude Gronfier n’hésite pas à parler de la « lumière bleue chronotoxique ». Si la lumière éveille pendant la journée — elle est nécessaire —, elle dérègle notre horloge biologique la nuit et a un impact sur la qualité du sommeil.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Sommeil : gare à la lumière bleue le soir

A terme, si les troubles du sommeil s’installent, des effets sur la santé peuvent apparaître, notamment au niveau métabolique (obésité, diabète…). Ainsi « la réduction de la durée de sommeil diminue la leptine et augmente la ghréline (sécrétée par l’estomac, qui stimule l’appétit et réduit la dépense locomotrice), avec pour conséquence une augmentation de l’appétit », relève la Société française de recherche et médecine du sommeil. Un mauvais sommeil peut aussi avoir un impact au niveau psychique (anxiété, dépression) et cognitif (concentration, apprentissage…).

Une prévention est nécessaire, alerte l’INSV. Outre les réflexes de bon sens, il est conseillé de réguler l’usage des écrans avant le coucher. La pédagogie doit venir des parents, mais ce n’est pas gagné. La moitié d’entre eux ne demandent jamais à leurs enfants de leur remettre leur téléphone avant de dormir, selon l’étude réalisée par élèves du lycée Jeanne-d’Arc.

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