La domotique sort de sa niche
Outils et services pour le logement abondent. Objectif : le maintien à domicile. Mais qui va payer ?
« On va dans le mur », affirme François-Xavier Jeuland, président de la Fédération française de domotique. On ne pourra jamais construire assez de maisons de retraite et les personnes âgées veulent rester chez elles. L'avenir passe par la domotique. » Les appareils d'assistance électronique se multiplient avec le boom des objets connectés. Sur un marché de la domotique en croissance de 35 % par an et qui atteindrait 1 milliard d'euros en France en 2015, selon le cabinet Xerfi, « les applications pour les personnes âgées sont celles qui progressent le plus ».
Pour expérimenter ces applications, l'IUT de Blagnac de l'université Jean-Jaurès de Toulouse a construit en 2010 une « maison intelligente », qui réunit 50 partenaires, dont 30 entreprises, des laboratoires et le CHU. Une fois entré avec une carte électronique, la lumière s'allume, les volets s'ouvrent, les meubles sont à hauteur variable, un sol lumineux guide les pas du lit aux toilettes, des capteurs de mouvements surveillent les chutes, le temps passé dans la cuisine ou l'ouverture du frigo ! La télévision sert de téléphone, de signal d'alerte et de console de jeux pour stimuler le cerveau. Les équipements sont signés ABB, Schneider, Legrand, Hager; les modules radio Snootlab, à Toulouse. Ils sont interconnectés sur le même réseau. En amont, le laboratoire d'automatismes Laas-CNRS et l'opérateur de télécoms à bas coûts pour les objets Sigfox étudient des semelles électroniques pour mesurer les variations de poids et de la marche.
Coût élevé
Numéro un en France, le groupe d'appareillage électrique Legrand à Limoges déploie, lui aussi, ses expérimentations et a acheté en 2011 le leader des systèmes de téléassistance, Intervox, pour proposer une offre globale. D'autres fabricants émergent. BlueLinea propose un dispositif de télésuivi des personnes fragiles et a acquis l'an dernier Marsollier Domotique, spécialiste des systèmes pour personnes âgées et handicapées. Un groupement de PME bourguignonnes commercialisera cette année un pack domotique comprenant un médaillon d'appel, un capteur de température, des détecteurs de chute, de fuite d'eau et de fumée, un chemin lumineux, un judas numérique, etc.
Mais à quel prix ? « Avec 2.000 euros de matériels "pluggés" facilement, on peut avoir une solution de suivi de la personne âgée, qui évite aux familles le coût exorbitant de la dépendance », affirme Eric Campo, professeur à l'IUT de Blagnac et chercheur au Laas-CNRS. « Cela va de quelques centaines d'euros pour un détecteur de chute à 20.000 euros pour la domotique d'un handicapé lourd », précise François-Xavier Jeuland. Reste des freins à lever comme l'absence d'organisme certificateur et le manque de financement du maintien à domicile. « La Sécurité sociale ne le financera pas, mais les assurances comme Inter Mutuelles Assistance et AG2R s'y intéressent beaucoup », affirme Eric Campo. Dans la Creuse, le département a équipé 2.300 ogements de pack domotique Legrand comprenant chemin lumineux, téléassistance, détecteurs de gaz, de fumée et de température, etc. Il subventionne les équipements gérés par une société de téléassistance délégataire et les occupants paient un abonnement.
Correspondant à Toulouse Laurent Marcaillou