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Billet de blog 26 janvier 2015

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Après le Cinéma de Papa : le transmédia.

Biarritz FIPA 2015. Festival International des Programmes Audiovisuels. " Les Heures Souterraines" ou "Marsman", téléfilms poètiques et introspectifs sur la vie quotidienne en Europe ou encore des reportages sur les viols de guerre au Rwanda, la Syrie et l’Irak martyrisés plus les attentats terroristes, plus les 41 murs-frontières plus toutes les autres « dead zone » : ces sujets sont largement explorés par les documentaires et fictions du Fipa de Biarritz (classiques ou transmédia).

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Biarritz FIPA 2015. Festival International des Programmes Audiovisuels. " Les Heures Souterraines" ou "Marsman", téléfilms poètiques et introspectifs sur la vie quotidienne en Europe ou encore des reportages sur les viols de guerre au Rwanda, la Syrie et l’Irak martyrisés plus les attentats terroristes, plus les 41 murs-frontières plus toutes les autres « dead zone » : ces sujets sont largement explorés par les documentaires et fictions du Fipa de Biarritz (classiques ou transmédia). Toutefois, peut-on écrire que la conscience globale progresse via le transmédia, à l’image de la mobilisation « JeSuisCharlie » ? Et que la narration linéaire du cinéma à l'ancienne va laisser la place aux productions transmédia ? Les sélections du Fipa et du SmartFip@ réaffirment chaque année avec force et conviction, leur vigilance et leur compassion, en regard des tragédies de l’histoire humaine. La connaissance et l’information se battent, avec leurs propres antidotes, contre la barbarie, l’obscurantisme pour faire reculer la peur, la haine de l’Autre. Les « autres » c’est « nous », c’est « JeSuisCharlie » plus aussi les « Je ne suis pas Charlie », 

à condition que ces affirmations sont diffusées dans le respect absolu de la démocratie, des libertés individuelles et publiques. Seule certitude incontestable, une mobilisation planétaire transmédia est née, non violente, axée sur la liberté d’expression, après un attentat odieux et un miraculeux  premier tweet initial. Le transmédia peut-il inventer le futur ? En préambule il se trouve qu’on a vu au Fipa 2015, une thèse insolite et dérangeante sur la manipulation des foules (Focus Australie - A Venue for the End of the World »). Ce documentaire (linéaire non transmédia) explore les similitudes troublantes entre la chorégraphie des immenses rassemblements nazis en regard des concerts de rock surdimensionnés. Le réalisateur intrépide Anden Prewett tente une vérification risquée in situ grandeur nature à Melbourne, dans un stade géant lors d’un congrès de syndicalistes enseignants. La foule, d’abord somnolente et tranquille, répond ensuite à l’injonction de ce speaker d’un jour, en acceptant de crier des slogans vengeurs contre « son ennemi désigné", le ministre de l’Education. Cette assemblée, devenant ainsi un organisme collectif manipulable ou toute réflexion personnelle semble neutralisée. La communication transmédia aura-t-elle, un jour, le pouvoir politique de changer le monde ? Pour promouvoir la télévision connectée du futur, ses sites transmédia, ses « narrations participatives » : le SmartFip@ de Biarritz s’est déployé « au centre » même du Fipa, attirant un public professionnel international vers ce rendez-vous incontournable et unique en Europe. En France, de nombreux autre spots transmédia progressent à vive allure dont le cluster (et ses concepteurs) implanté à Marseille le Pôle Régional Image Multimédia Internet (Primi). La plate-forme transmedia « Anarchy c’est le chaos entrez dans l’Histoire » (France Télévision Nouvelles Ecritures), fait figure de prototype avec un site participatif, des « auteurs-citoyens », une série télévision en « création collective » ( France 4-oct. 2014), un roman. " C’est le chaos. Entrez dans l’histoire... Écrivez le scénario."  Anarchy propose « de vous immerger dans une France chahutée, d’écrire son histoire et de la raconter telle que vous l’imaginez. Les personnages et les histoires sont les vôtres. ». Ont contribué à ce site expérimental ( en langue française) 2633 « auteurs », via 1372 personnages imaginés par une communauté de citoyens on line. Le tout fonctionne comme un « moteur ». Entre rêve et réalité, le site web de cette fiction politique (pas si fictive ?) a vécu sur 7 semaines, enregistré 11290 textes et totalisé 700 000 pages lues. Il est divisé en 3 zones : l’Actualité avec son JT quotidien et tous « codes », puis l’espace des « Héros », et enfin un palmarès final de ce qui est un vaste jeu de rôle civique. Le gagnant du « Top des auteurs » , élu par les joueurs, est un certain Monsieur « PeaceMaker », un français bien réel, qui habite Grenoble et qui est interviewé en vidéo sur le site. D’autres joueurs sous pseudonyme, inspirés et réactifs, ont imaginé une Reine gouvernant une Bretagne monarchie indépendante. Ou bien une occupation du Palais présidentiel de l’Elysée et des témoignages bouleversants de CRS en rupture (http://anarchy.nouvelles-ecritures.francetv.fr). L’action se déroule en novembre 2014 dans une France malmenée par une crise bancaire et qui décide de sortir de l’euro : « les institutions vacillent. Serez-vous mieux armé que votre voisin pour survivre ? Anarchy vous invite à réfléchir sur ce qui constitue la société et à imaginer ensemble un nouveau monde. » Pour le module série télévisée, une fiction expérimentale (8x26 Réal. Michel Hassan), des personnages « créés par vous » ont été intégrés chaque semaine dans le scénario portant sur « la fondation Léopold II, lieu préservé, enclave belge en territoire français. Deux marginaux, Lustick, officier de l’armée en retraite, et Mathilde, gouvernante quasi muette, y maintiennent les vestiges et le rayonnement du plat pays à l’international… ».
Impressionnant aussi le site Connected Walls (Real. S. Wielemans), qui fait dialoguer des humains prisonniers de hauts et larges murs frontaliers de séparation, lesquels existent entre Maroc et Europe, entre Israel et Palestine, entre Corée du Nord et du Sud, entre Mexique et Etats-Unis. Autre choc transmédia : le dispositif Emergency Exit dans le camp de réfugiés de Kukuma (Kenya). Le site et le webdoc oeuvrent à la réunification des familles séparées par 20 ans de guerre civile. Autre miracle transmédia Pirate Fishing pour devenir journaliste d’investigation en Sierra Leone, à la poursuite des chalutiers Nord-Coréens pratiquant les pêches illégales : « indices et constations : à vous de démasquer les coupables. » Au SmartFip@, la prospective se déploie en direct  avec la traditionnelle compétition Hackathon (sur 48hrs) afin de créer une oeuvre commune, du synopsis à ses possibles prolongements transmédia. Le fil conducteur cette année un projet de documentaire France Télévision sur la civilisation gauloise. On teste alors la faisabilité des concepts, la définition d’un public potentiel, le scénario comme le terminal ( smartphone ou tablette ?). Vainqueur en 2015 le site « Qu’est-ce qu’elle a ma Gaule ?! » Au final faire un film va-t-il automatiquement signifier imaginer un jeu ou une application mobile ? Les données élaborées par les historiens officiels seront-elles menacées par cette approche de l’histoire plus ludique et participative? Peut-être en créant plus de rencontres entre des gens ayant des des parcours, des milieux sociaux, des pays tous différents ? Benjamin Hoguet (Story Code Paris)« Ici sur ce Hackathon, on valorise un contenu la culture gauloise, on peut créer une interaction dans le cercle familial via un jeu de plateau ou une présence sur twitter. C’est puissant car cela s’inscrit dans la grande histoire, à partir de faits réels, avec des fictions véridiques, une base historique solide ». On part de la civilisation gauloise et arrive à un jeu, existe-t-il un risque de perte de contact avec la réalité et la vérité historique dans ces univers virtuels ? « C’est une question fondamentale, certes on déforme un peu la réalité mais quand on bien arrimé à ses informations, on peut les encapsuler dans une fiction. Un historien pourrait dire, là il y a une erreur historique mais le but, c’est de démocratiser le savoir, sinon il resterait la seule propriété des historiens, qui ne sont pas les meilleurs communicants du monde. Parfois il vaut mieux faire passer une partie du savoir historique dans un jeu, plutôt que rien ou 5 % dans des livres qui touchent peu de personnes. C’est un équilibre précaire entre l’acuité historique et le côté plus engageant destiné à un public de non-historiens. » Le « Cinéma de Papa » linéaire sera-t-il un jour minoritaire ? Les films, comme celui-ci tourné par Claude Berri (197), seront-ils détrônés par le transmédia, les diffusions participatives sur le web, les spectateurs-acteurs-auteurs, les réactions twitter, les jeux on-line ? Poser la question c’est y répondre car les spécialistes estiment que toute oeuvre humaine est participative.

LV.

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